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Le céleri
Friday 4 June 2010, by
Le céleri est le principal aliment du syndrome “ bouleau-armoise-Apiacées.
On retrouve des prévalences de positivité très élevées pour le bouleau (40 à 100%) et/ou pour l’armoise (50 à 100%) parmi les patients sélectionnés sur la base d’une allergie au céleri .
Le lien entre sensibilisation pollinique et allergie au céleri s’explique par la présence d’allergènes homologues à ceux du céleri dans le bouleau (PR-10 et profiline) et dans l’armoise (profiline).
- La PR-10 de céleri est Api g 1 , la profiline est Api g 4 .
- Il est très vraisemblable que l’armoise contient aussi un autre (ou d’autres) allergène(s) croisant avec le céleri.
- Une hypothèse serait la présence dans le pollen d’armoise d’une protéine homologue d’Api g 5 .
- Api g 5 est une protéine glycosylée de 55-58 kDa dont l’IgE-réactivité semble limitée à ses chaînes glucidiques . Certains fragments d’Api g 5 présentent une homologie avec des enzymes à FAD comme Phl p 4 (fléole) ou Cyn d 4 (chiendent digité) .
La sensibilisation pollinique induit la réactivité vis à vis du céleri .
- Ceci est visible dans la dissymétrie des réactions croisées bouleau-céleri ou armoise-céleri : l’inhibition du pollen par le céleri est souvent incomplète, contrairement à l’inhibition du céleri par le pollen .
- Le lien entre armoise et céleri est attesté par TPO chez patients mono-polliniques à l’armoise .
- De plus, Bohle a montré que l’activation des cellules T était plus efficace avec Bet v 1 qu’avec Api g 1 .
Si bouleau et armoise sont manifestement associés à une réactivité pour le céleri, d’autres pollens peuvent ajouter leur part dans la sensibilisation du patient vis-à-vis des profilines . C’est le cas des graminées qui, dans certaines régions, sont plus souvent positives que le bouleau ou l’armoise chez les allergiques aux Apiacées .
Le rôle des profilines est moins bien établi que celui des PR-10.
- Des réactions cliniques avec le céleri sont rencontrées dans des régions dépourvues de bouleaux .
- En Allemagne, les sujets polliniques au bouleau présentent une réactivité pour Api g 1, mais ceux qui sont polliniques à l’armoise aussi ont une fréquente réactivité pour les profilines en blot (15 kDa) . Cela est visible particulièrement dans les séries de patients polliniques à l’armoise mais pas au bouleau .
L’allergie au céleri peut donc se présenter avec une réactivité vis à vis d’Api g 1 (PR-10), d’Api g 4 (profiline) ou d’Api g 1 et Api g 4.
- Pauli estime que l’allergénicité du céleri est supérieure en cas de pollinose à l’armoise plutôt qu’au bouleau isolément .
- Cela rejoint les constatations de Wüthrich pour qui la cuisson affecte plus la réactivité du céleri chez les sujets bouleau-céleri que chez les sujets armoise-céleri .
- De même Bauer note que 7 fois sur 9 une réaction systémique avec le céleri associe armoise et bouleau.
Cette allergénicité accrue liée à l’armoise pourrait trouver sa cause dans la présence d’allergènes croisants jusque-là non caractérisés, notamment parmi les protéines de poids moléculaire élevé (“ HMW ”) .
Parmi les différentes formes sous lesquelles le céleri est consommé, le tubercule (racine) semble plus allergisant que les feuilles , certains patients n’étant allergiques qu’au tubercule .
- Le céleri en tant qu’épice provient de la racine séchée et broyée et donne aussi des réactions comme le céleri-rave cru .
- Cependant, aucun cas d’allergie au sel de céleri n’a été relevé dans les statistiques du CICBAA .
Le céleri est la cause de réactions cliniques parfois très sévères . En Suisse, près de la moitié des réactions au céleri sont systémiques .
Une anaphylaxie induite par l’effort , ou par l’aspirine a été rapportée. Dans les deux cas les patients avaient une pollinose à l’armoise.
Le Réseau d’Allergo-Vigilance avait relevé en mai 2010 40 cas pour le céleri (sur 900 déclarations), ce qui place le céleri en 5 ème position parmi les causes d’allergies alimentaires sévères.
L’allergie au céleri est liée également aux habitudes alimentaires locales. Par exemple, le céleri-rave n’est pas consommé en Italie .
Céleri et stabilité à la cuisson et à la digestion
La cuisson diminue fortement la réactivité au céleri chez les sujets sensibilisés essentiellement aux PR-10 (Api g 1), donc chez les patients polliniques au bouleau mais pas à l’armoise .
- Ceci est du à l’instabilité des PR-10 à la chaleur. Après chauffage, Api g 1 ne se refolde pas normalement .
- Wüthrich montre que les TC natifs sont négativés après cuisson chez 12/13 patients mono-bouleau contre seulement 6/27 des armoise ou armoise+bouleau .
- De même, Ballmer-Weber observe que parmi 6 patients avec TPODA encore positif avec le céleri après cuisson, 5 sont positifs pour les profilines et/ou des protéines de haut poids moléculaire .
- Cette réactivité au céleri cuit peut provenir d’Api g 5, dont on sait la grande résistance à la chaleur. Pour Bublin, cela est en lien avec la glycosylation d’Api g 5 .
On a donc, en simplifiant, des patients bouleau, Api g 1, tolérants après cuisson, et des patients armoise, allergiques après cuisson aussi et présentant volontiers des réactions plus sévères.
Le mode de cuisson pourrait ne pas être indifférent aussi dans l’évolution de l’allergénicité du produit :
- Wüthrich a montré, par exemple, qu’en cas de cuisson dans l’eau, cette dernière éluait des allergènes présents dans le céleri et que l’eau de cuisson était elle-même capable de donner des TC positifs . Cela n’est pas neutre dans les cas où l’eau de cuisson est ingérée (soupes).
Contrairement au chauffage, le séchage, l’irradiation ou les hautes pressions ne modifient pas l’IgE-réactivité du céleri .
Le devenir de l’IgE-réactivité des allergènes de céleri au cours de la digestion intestinale a été insuffisamment étudié.
- On peut supposer que la PR-10, Api g 1 est rapidement détruite, tandis que la profiline, Api g 4, a une résistance modérée.
- Mais il semblerait que, globalement, le céleri présente une assez bonne résistance à la digestion tant stomacale qu’intestinale .
- Il est possible que cela soit du à des allergènes HMW, notamment parce que ces derniers s’avèrent souvent correspondre aux composants glycosylés du céleri.
Céleri et CCD
(voir aussi: Les CCD)
Le céleri semble avoir une place particulière dans la question, non encore résolue, de la relevance clinique des épitopes glucidiques IgE-réactifs.
En effet, la fréquence des réactivités in vitro de type CCD chez les patients allergiques au céleri est élevée, de l’ordre de 25 à 50% .
Par ailleurs :
- Fötisch montre que le complexe MUXF-BSA (chaînes glucidiques + bovalbumine) est capable de générer une histaminolibération chez un patient allergique au céleri
- Lüttkopf observe un TPODA positif pour le céleri chez un sujet positif uniquement pour des CCD
- Bublin remarque que l’histaminolibération induite par Api g 5 n’est pas reproduite si Api g 5 est présenté sous forme déglycosylée ,
- et dans le même travail, il est montré que MUXF-BSA et Api g 5 (non déglycosylé) inhibent des bandes HMW tant dans le céleri que dans l’armoise.
Ces résultats font estimer par certains experts que, du moins chez quelques patients, les épitopes glucidiques pourraient avoir une relevance clinique .
Mais la récente étude Europrevall sur le céleri aboutit à une conclusion contraire : aucune stimulation cellulaire n’a pu être obtenue avec Api g 5 dans un test RBL (Rat Basophil Leukemia) pour 8 patients CAP positifs nApi g 5 et présentant une allergie au céleri attestée par TPODA.
La présence d’une réactivité de type CCD dans le sérum des patients impose donc une certaine prudence dans l’interprétation des tests in vitro pour le céleri .
Apport des tests in vitro pour le diagnostic d’une allergie au céleri
S’il a été cherché d’améliorer le diagnostic in vitro à l’aide de tests cellulaires , l’intérêt s’est porté très tôt sur l’utilisation des allergènes recombinants .
Le concept d’un diagnostic moléculaire (“ component-resolved diagnosis ”) a été appliqué au céleri et les premiers résultats en ont récemment été présentés dans le cadre du projet européen Europrevall .
Trois molécules ont été testées : rApi g 1 (PR-10), rApi g 4 (profiline) et la protéine naturelle purifiée nApi g 5. Le diagnostic d’allergie au céleri était confirmé par TPODA. Les 24 patients (Allemagne) étaient polliniques au bouleau, la plupart aux graminées et/ou à l’armoise :
- La sensibilité diagnostique de rApi g 1 était de 75%, avec une spécificité de 65%. Ces chiffres rejoignent ceux déjà publiés pour des patients également polliniques au bouleau .
- rApi g 1 présentait une meilleure sensibilité que le CAP céleri (67%), mais était moins spécifique (= plus souvent positif chez les 20 polliniques au bouleau sans allergie au céleri)
- La positivité pour rApi g 1 et/ou rApi g 4 et/ou nApi g 5 portait la sensibilité à 87%. Mais cela au prix d’une spécificité de 55% seulement
Ce travail n’a donc pas montré une amélioration décisive du diagnostic in vitro avec l’usage de tests basés sur des allergènes purs/recombinants plutôt que sur l’extrait classique (CAP céleri).
Par ailleurs, aucun de ces 3 allergènes ne permettait de différencier une réponse clinique limitée à la sphère orale d’une réponse systémique :
- positivité pour rApi g 1 : syndrome oral 7 patients, réaction systémique 10 patients
- pour rApi g 4 : 5 vs 5
- pour nApi g 5 : 6 vs 4
On pourra cependant remarquer 2 points à partir des résultats de cette étude (cf. figures ci-dessous) :
- il n’existe pas de bonne corrélation entre rBet v 1 et rApi g 1. Bien que Bet v 1 soit a priori l’initiateur de la réactivité à Api g 1, les patients reconnaissent des épitopes sur Api g 1 qui sont parfois différents de ceux reconnus sur Bet v 1
- il existe par contre une bonne corrélation entre le glyco-reporter MUXF-BSA et nApi g 5 : la réactivité à ce dernier semble donc n’être que l’image de la réactivité CCD chez ces patients, laquelle est fortement liée aux graminées (7 patients CCD positifs sur les 9 qui ont un CAP fléole > 30 kU/l).