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La moutarde
mercredi 12 mai 2010, par
La moutarde est un condiment (souvent inclus dans les épices) contenant entre autres des graines de différentes espèces de Brassicacées :
- Sinapis alba, la moutarde jaune (ou blanche)
- Brassica nigra, la moutarde noire
- Brassica juncea, la moutarde de Chine (ou brune), qui est un hybride de B.nigra et de B.napa oleifera (navette).
La moutarde est la cause d’un certain nombre de cas d’allergie alimentaire chez l’enfant .
Les statistiques établies par le CICBAA (mai 2007, Moneret-Vautrin DA, communication personnelle) placent la moutarde au 13ème rang parmi les allergies alimentaires de l’enfant, soit 1,15% des allergies relevées avant l’âge de 15 ans. Au-delà de cet âge, la moutarde ne fait pas partie des 20 premières causes d’allergie alimentaire.
La prévalence de l’allergie à la moutarde varie beaucoup d’une étude à une autre en raison des habitudes locales de consommation et de l’âge des patients.
Des taux allant jusqu’à 7 à 16 % ont été avancés, mais ils doivent être tempérés car la preuve d’une allergie à l’aide d’un TPODA n’a été que rarement obtenue . Le goût de la moutarde étant difficile à masquer, le diagnostic d’allergie a été souvent basé sur un TPO en simple aveugle et même, parfois, sur une histoire clinique confortée par un test cutané positif.
En mai 2010 le Réseau d’Allergo-Vigilance avait rapporté 3 cas d’allergie sévère à la moutarde (sur 900 déclarations).
Les allergènes de la moutarde
Bra j 1 (B. juncea) et Sin a 1 (S. alba) sont des 2S albumines proches des napines trouvées dans les graines de colza. Sin a 1 croise avec Bra n 1 du colza et avec Bra j 1 .
Ces allergènes sont, à priori, les allergènes principaux des graines de moutarde.
En plus des 2S albumines, ont été montrées IgE-réactives :
- une 11S globuline (Sin a 2) , qui est faiblement homologue d’Ara h 3 (arachide) et d’Ana o 2 (noix de cajou).
- Une LTP (Sin a 3) et une profiline (Sin a 4) dans la moutarde jaune, positives respectivement chez 9/15 et 4/15 patients Espagnols allergiques à la moutarde (et à la pêche) .
Un syndrome armoise-moutarde ?
Plusieurs études espagnoles semblent accréditer l’existence d’un syndrome armoise-moutarde, comme l’a suggéré Figueroa chez les sujets adultes .
Plus généralement, il pourrait s’agir d’une association Composées-Brassicacées :
- 37 TC positifs armoise parmi 38 allergiques à la moutarde, parmi lesquels une histoire clinique d’allergie au chou, chou-fleur et/ou brocoli est notée 9 fois .
- dans cette étude, moutarde et armoise croisent et les deux se montrent capables d’inhiber l’IgE-réactivité pour les différents choux
- 16 TC positifs armoise parmi 17 allergiques au chou, avec aussi 12 histoires cliniques positives pour la moutarde et 11 pour la pêche. Ici la moutarde croise avec la LTP du chou Bra o 3 .
- Dans une autre étude 90 % des sujets allergiques à la moutarde sont polliniques et de nombreux patients rapportent des réactions alimentaires pour les fruits des Rosacées . La pêche était montrée capable d’inhiber la LTP de moutarde Sin a 3.
Ces études espagnoles pointent bien vers un lien possible entre pollen (armoise) et aliments (moutarde, choux, Rosacées) par le truchement de LTP. La survenue fréquente de réactions ne se limitant pas à un syndrome oral (13 cas/15 <biblio11032), voire anaphylactiques , accrédite d’autant un rôle pour les LTP.
Mais la pollinose n’est pas systématique , ni l’allergie aux Rosacées . Et, ailleurs qu’en Espagne, une histoire clinique d’allergie à la moutarde semble ressortir d’un autre mécanisme, n’étant relevée que chez 2 patients sur 49 mono-réactifs aux LTP .
L’allergie à la moutarde chez l’enfant
L’allergie à la moutarde se manifeste parfois très tôt dans l’enfance et des contacts ignorés (petits pots, allaitement ?) ont été évoqués pour expliquer cette précocité .
Par exemple, une étude a montré que sur 15 cas pédiatriques d’allergie à la moutarde il n’y avait eu aucun contact connu pour 8 enfants .
Les études portant sur une population pédiatrique contrastent fortement avec celles menées chez l’adulte :
- pas de cas d’anaphylaxie en France
- et un rôle plus restreint ou absent pour une pollinose concomitante.
- Par exemple, un tableau en demi-teinte est vu dans un travail espagnol (8 TC positifs armoise parmi 42 enfants).
En France, les travaux de Rancé ont porté sur une population pédiatrique très souvent atteinte d’eczéma atopique (52 % , 86 % ).
- Ces enfants avaient également une allergie à des aliments classiques dans ce cadre : œuf, arachide, etc… et il est difficile de savoir si l’allergie à la moutarde est alors une entité bien spécifique ou une manifestation clinique à un aliment parmi une constellation de réactivités à des aliments en tous genres.
Quoi qu’il en soit, l’allergie à la moutarde chez l’enfant, hors d’un environnement méditerranéen, est bien réelle , même si elle ne met pas en jeu des pollens et/ou des LTP.
Le régime d’éviction de la moutarde concerne de multiples aliments manufacturés et l’alimentation de type fast-food .
Allergie à la moutarde : diagnostic
Des seuils de réactivité in vitro ont été proposés, mais ils restent insuffisants, la VPP culminant au mieux à 80 % , voire à 65 % . Il en est de même en suivi, pour déterminer une éventuelle acquisition de tolérance .
Le diagnostic de cette allergie gagnerait beaucoup à pouvoir être conforté par la mesure de l’IgE-réactivité vis à vis de Sin a 1 ou Bra j 1.
Accessoirement, il pourra être testé rPru p 3 comme témoin d’une réactivité à la LTP de moutarde. En effet, même si l’identité entre Pru p 3 (pêche) et Sin a 3 (moutarde) n’est globalement que de 54%, elle s’élève à environ 70% au niveau de 2 des 3 zones porteuses d’épitopes sur Pru p 3 .