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Les Pariétaires
samedi 26 juin 2010, par
Les pariétaires sont une cause importante de pollinose en milieu méditerranéen.
En plus d’une composante asthmatique fréquente, la pollinose aux pariétaires se caractérise par une tendance perannuelle liée à une émission pollinique prolongée dans les régions les plus méridionales (sud de l’Italie, Grèce) .
En Europe, la pariétaire de Judée (Parietaria judaica) a une zone d’extension plus méridionale que la pariétaire officinale (P. officinalis).
D’autres espèces coexistent, dont l’impact allergologique est moins bien cerné, comme P. lusitanica ou P. mauritanica.
Les pariétaires sont des Urticacées. Dans cette famille, on trouve aussi les orties dont les pollens sont présents partout en Europe et difficilement différenciables de ceux des pariétaires. Mais les pollens d’ortie semblent peu allergisants .
La prévalence de positivité pour les pariétaires en tests cutanés varie selon les régions et les critères de sélection des patients :
- de 6 à 10% dans une population non sélectionnée sur la base d’une pollinose
- jusqu’à 35% parmi des polliniques en Espagne, aux Canaries ou en Italie ; et jusqu’à plus de 75% dans le sud de l’Italie (ex. Sicile)
- plus souvent en cas d’allergie alimentaire concomitante
Une mono-réactivité pour la pariétaire est rencontré chez 10-20% des patients , plus souvent dans les régions de forte pression pollinique, moins souvent ailleurs (ex. Grande Bretagne ).
Le diagnostic d’une pollinose aux pariétaires peut parfois poser problème en raison d’une saisonnalité peu marquée et de la fréquence des pollinoses associées.
En dehors d’une mono-pollinose, les résultats positifs (in vitro et en TC) peuvent être dus à une réactivité croisée avec des panallergènes polliniques.
- Par exemple, en Italie du Nord, beaucoup de TC positifs pour la pariétaire étaient dus à des réactivités croisées avec des profilines et/ou des polcalcines de graminées : dans cette étude, seulement 1/3 des pariétaires positives étaient rPar j 2 positives.
- Certains auteurs estiment cependant que les pariétaires se distinguent un peu d’autres herbacées en étant moins systématiquement positives chez les sujets sensibilisés aux profilines. Ils observent des taux relativement plus faibles de TC positifs pour la pariétaire parmi des patients multi-polliniques en Italie méridionale (39 % ou 50 % ).
En plus de cette possible « faiblesse » en profilines des pollens de pariétaire, laquelle peut en partie expliquer le peu d’allergies alimentaires qui y sont associées, d’autres propriétés placent les pariétaires dans une position particulière :
- Leurs allergènes principaux sont des LTP atypiques
- Des pigments flavonoïdes forment, avec certaines protéines présentes aussi dans les grains de pollen, des complexes IgE-réactifs très stables .
- Une activité peptidasique a été montrée pour une bande de 98 kDa et cette enzyme semble capable de favoriser l’allergénicité du pollen de pariétaire en fragilisant l’épithélium bronchique, un peu comme Der p 1 s’agissant des acariens .
Les allergènes des pariétaires
Les LTP
Par j 1 et Par j 2 (P. judaica) ont été identifiés très tôt . Comme Par o 1 (P. officinalis) et Par m 1 (P. mauritanica), ils sont classés parmi les LTP .
Par j 1 et Par j 2 existent sous différentes isoformes (10,7 à 14,7 kDa) et leur homologie est modérée (environ 45 % d’identité) . Bien que partageant un de leurs épitopes, Par j 1 et Par j 2 ne croisent pas entre eux . Par contre, Par j 1 croise aisément avec ses homologues dans d’autres espèces de pariétaires .
Ces allergènes sont des LTP particulières :
- Ils sont glycosylés, ce qui les distinguent des LTP habituelles, même si la part d’IgE-réactivité de cette glycosylation pour Par j 1 ou Par j 2 paraît faible à nulle
- ils ne croisent pas avec d’autres LTP et, notamment, avec Pru p 3 (pêche) .
Par j 1 et Par j 2 sont donnés pour être positifs chez plus de 80-90 % des polliniques aux pariétaires . Mais ces taux très élevés sont peut-être le reflet d’un biais de sélection, comme une mono-pollinose à l’armoise : d’autres études rapportent plutôt 30-35% .
Par j 1 et Par j 2 sont cependant les allergènes de pariétaire les plus importants : à eux deux, ils représentent souvent plus des 2/3 de l’IgE-réactivité de l’extrait du pollen
Ces allergènes sont donc à préférer à l’extrait de pollen pour confirmer une sensibilisation aux pariétaires, c’est-à-dire différencier celle-ci d’une positivité relevée avec l’extrait et pouvant provenir d’une pollinose d’autre origine.
Tester rPar j 2 en CAP permet donc de confirmer une véritable sensibilisation aux pariétaires .
- Ce recombinant issu d’E. Coli ne montre pas de différence d’IgE-réactivité avec l’allergène naturel nPar j 2 .
- Cela n’est pas le cas pour les recombinants rPar j 1 et rPar j 2 issu de Pichia pastoris et qui ont une IgE-réactivité plus faible (glycosylation particulière effectuée par cette levure ?) .
Autres allergènes
Une profiline, Par j 3 , et une polcalcine sont présentes dans le pollen de pariétaire de Judée et croisent avec leurs homologues dans le pollen de bouleau ou de fléole ou d’olivier .
La réactivité pour la profiline est notable dans certaines études : ainsi 71% des polliniques à la pariétaire négatifs pour rPar j 2 étaient positifs pour la profiline de fléole rPhl p 12 .
Des inhibiteurs trypsiques de 20-24 kDa seraient IgE-réactifs dans ce même pollen .
Une protéine liant le calcium, dite « 4EF-hand », pourrait être IgE-réactive également du fait de réactions croisées observées entre le pollen de pariétaire et l’allergène Jun o 4 (une 4EF du pollen de genévrier . Cependant il n’est pas exclu que cette RC soit à attribuer à une autre RC, celle entre des polcalcines (2EF) présentes dans de nombreux pollens, y compris les pariétaires, et les 4EF elles-mêmes .
Réactions croisées des pariétaires avec d’autres pollens
Pollens d’Urticacées
Si la pariétaire de Judée et la pariétaire officinale croisent très bien entre elles , ces pollens ne montrent pas de réactivité croisée avec l’ortie ou avec la ramie (Boehmeria nivea) .
Par exemple, dans une étude menée à Londres, parmi des patients avec rhinite estivale, sur les 13 sujets avec un TC positif pour l’ortie, seuls 4 avaient aussi un TC positif pour la pariétaire .
Autres pollens
Que ce soit par l’intermédiaire de profilines et/ou de polcalcines, les pollens de pariétaires peuvent croiser avec le bouleau , l’armoise , des graminées , des Cupressacées .
En tests cutanés, on ne peut exclure qu’un résultat positif pour les pariétaires soit le résultat d’une réactivité croisée avec d’autres pollens.
In vitro, on peut ajouter l’interférence de CCD . Il ne faut pas oublier, en effet, que si Par j 1 et j 2 ont une glycosylation particulière, la réactivité de type CCD peut provenir d’autres protéines dans l’extrait.
Une réaction croisée entre la pariétaire de Judée et Holoptelea integrifolia (orme indien, Ulmacées) a été notée dans une étude comparant des patients polliniques indiens et français .
- Chez les sujets indiens, exposés à Holoptelea mais pas à la pariétaire, cette dernière inhibe bien Holoptelea.
- Mais chez les sujets français, non exposés à Holoptelea, ce pollen ne parvenait pas à inhiber celui de pariétaire.
- Cette contradiction de réciprocité immunologique s’explique ainsi : les patients indiens réagissaient à d’autres allergènes que des homologues de Par j 1/j 2 dans Holoptelea ; les français étaient eux essentiellement sensibilisés à Par j 1/j 2 ; Holoptelea ne contient pas (ou peu) d’allergènes homologues à Par j 1/j 2, mais des panallergènes type profilines.
Réactions croisées des pariétaires avec des aliments végétaux
Malgré l’importance de l’allergie aux pariétaires parmi les patients polliniques dans le pourtour méditerranéen, l’association d’une allergie alimentaire à une sensibilisation aux pariétaires est rare.
Cela pourrait être en relation avec l’originalité des LTP des pariétaires : par exemple, seulement 6% de rPar j 1 positifs parmi les patients avec un syndrome oral dans l’étude EXPO, contre 33% de Pru p 3 positifs .
Ou bien du fait d’une réactivité croisée plus modérée des profilines de pariétaires .
Quelques cas isolés d’allergie à la pistache , à la bette (Beta vulgaris cicla) , à la roquette , à l’aubergine ou à l’artichaut ont été observés.
La mûre a aussi été remarquée .
La pollinose vis-à-vis d’autres pollens que la pariétaire et/ou une sensibilisation directe à la pêche pouvaient souvent expliquer les tableaux immunologiques décrits. Mais parfois la pollinose aux pariétaires était isolée et pourrait être tenue responsable de l’allergie alimentaire concomitante.
Dans une série de patients italiens allergiques aux Rosacées, ceux qui avaient un TC positif pour la pariétaire (ou pour l’armoise) présentaient une plus large réactivité clinique aux fruits que ceux qui étaient polliniques aux graminées ou non polliniques .
La question est donc : existe-t-il un lien particulier entre la pariétaire et certains allergènes dans des aliments végétaux ? Ou la sensibilisation à la pariétaire est-elle un épiphénomène chez des patients ayant un profil atopique plus sévère ?